Pages

12/02/2011

Parashat Toldot

Parashat Toldot

Notre parasha nous relate la vie de notre Patriarche Itzh'ak, sa manière de continuer la voie de son père, Avraham auquel il ressemble [cf. Rashi 25:19, Bereshit Rabba, ibid.], puis ses engendrements - les (faux?) jumeaux : Essav et Ya'akov. Ancêtres de deux Peuples plutôt antithétiques et ce, durant des siècles. On nous raconte également leur péripéties, et leur nature divergente : Ya'akov, le plus jeune homme simple, est assis sous les tentes, alors qu'Essav est un homme à grande faim, toujours prêt à la chasse tant des animaux que des femmes [cf. T.B. Baba Bathra 16b et Rashi 26:34] dès le plus jeune âge. En effet, la vente du pain et du plat de lentilles en échange du droit d'aînesse se produisit à la mort d'Avraham, puisque ledit plat constituait le repas des endeuillés que Ya'akov préparait [ibid.] alors que les deux jeunes avaient juste quinze ans…
Le passage relatif à la vente par 'Essav de son droit d'aînesse est rapporté dans la Tora en ces termes :
"Et Ya'akov donna à Essav du pain et du potage de lentilles, il mangea et il but, il se leva et il partit, et Essav dédaigna le droit d'aînesse." (Bereshit 25:34)

L'ordre précis des derniers mots dans notre verset est plein d'enseignements. Au début de la vente, on peut encore juger Essav de manière favorable il était fatigué et tellement affamé que, en raison du danger que constituait son énorme faim, il fut obligé de conclure cette vente ; en revanche, il n'avait jamais eu l'intention de dédaigner le droit d'aînesse ou d'en rabaisser la valeur. Mais à partir du moment où il a déjà mangé et qu'il a déjà étanché sa soif, il est maintenant logique qu'il élève sa voix pleine de regrets et de tristesse: "j'y étais contraint et forcé et je regrette toute cette vente!".
Au contraire, il est écrit: "il mangea et il but, il se leva et il partit". Il s'est levé et est parti en silence, avec satisfaction, comme si rien ne s'était passé.
C'est à ce moment-là qu'il nous apparaît qu'Essav dédaigna le droit d'aînesse. Il nous apparaît que l'acte même de la vente ne provenait pas de la faim, mais d'une attitude d'outrage et de mépris envers le droit d'aînesse qui n'avait aucune valeur à ses yeux.

Puis vient l'épisode de la bénédiction. Itzh'ak se fait vieux, il avait déjà perdu la vue et veux bénir son fils Essav, du moins c'est ce qu'il lui dit. Celui-ci doit, en contrepartie, lui préparer une viande chassée, telle qu'il l'aime. Rivka - au courant, alerte Ya'akov et prépare deux agneaux pris par Ya'akov du bétail, habille son fils des habits d'Essav, son frère et lui dit de se présenter devant Itzh'ak pour demander sa bénédiction.
Quel est le but de tout cette trame?
Itzh'ak était-il au courant de ce qui se passait sous son toit?
Les avis des commentateurs divergent sur ces questions.

En tout cas, il est écrit que Ya'akov a dit à sa mère, Rivka : "Si par hasard mon père me tâte, je serai à ses yeux comme un trompeur, et, au lieu de bénédiction, c'est une malédiction que j'aurai attirée sur moi" (Bereshit 27:12). Il avait peur que son père s'aperçoive que cet octroi n'était pas justifié.

Le Ramban [ibid.] demande pourquoi Ya'akov n'a-t-il pas craint que son père le reconnaisse à sa voix, même sans toucher ; en effet, il est de règle qu'un aveugle et également le reste des hommes sont permis à leur femme respective durant la nuit, car il y a une reconnaissance vocale et cela suffit [cf. T.B. H'oulin 96a].

Nah'manide répond qu'il est possible que les deux frères avaient une voix similaire, ainsi nos Sages nous enseignent [Bereshit Rabba 65, 19] que le verset explicitant "la voix de Ya'akov" nous parle non pas de sa voix, telle qu'elle est entendue, mais de ses propos, il parlait de manière douce et agréable, en rappelant le nom Divin.
Peut-être, dit-il encore, comme deuxième possibilité, a-t-il modifié sa voix afin qu'elle ressemble à celle de son frère.

Nous apprenons du Ramban deux choses :

1. Il faut parler avec chacun de manière douce, ne pas crier, symbole de force intérieure, en rappelant le nom Divin, Le liant à nos paroles, afin de les élever [cf. Ohev Israël du Rav A.Y. Heshel MeApta au nom de Rav Nah'man Kassavir sur le verset ; comm. du Gaon de Vilna sur Proverbes 13:18 ; les propos du Ramban à son fils dans sa lettre, sur le fait de parler avec douceur].

2. Il faut savoir distinguer le paraître de l'être. Souvent la limite est très fine.
Cela a été expliqué littéralement par le rav S.R. Hirsch affirmant que Ya'akov et Essav sont des jumeaux qui se ressemblent surtout extérieurement, c'est à dire dans leur paraître.
Alors comment expliquer le terme Admoni (roux - Bereshit 25:25) ?

Le Baal Hatourim précise que Essav était couvert du sang de la matrice de Rivka qui a saigné de façon abondante au moment de sa naissance, punition “à la mesure” de ses plaintes. D’autres commentateurs expliquent qu’il est marqué qu’Essav est roux pour nous dire qu'il est sanguinaire et va verser du sang, mais cela n'a rien à voir avec son apparence.
Nous voyons donc que même s'ils se ressemblaient extérieurement, ce qui les distinguait, comme le souligne le midrash cité par le Ramban, c'est l'essence, ce qu'ils disent. Essav pleure et s'énerve.

Un message tant moral que philosophique.
Il faut savoir parler convenablement et s'occuper de choses essentielles, tel que le fait Ya'akov, l'érudit assis dans les tentes atteignant la plénitude - seulement ainsi on peut mériter la bénédiction. Itzh'ak, bien qu'aveugle, sait différencier de ces choses. Quand il voit qu'Essav n'a pas atteint ce niveau spirituel et moral, il ne lui dit pas qu'il a une deuxième bénédiction "dans son sac", celle d'Avraham, l'héritage de la Terre d'Israël, Itzh'ak était pourtant sous une pression psychologique aiguë. Il lui invente une nouvelle bénédiction.

C'est seulement plus tard qu'il la donnera à Ya'akov (Bereshit 28:4) [cf. à ce propos Midrash Ariel du Rav Itzh'ak Arieli, auteur d'Einayim LaMishpat, ibid.].Itzh'ak était en effet plus lié à la Terre d'Israël que le reste des Patriarches, il n'en est jamais sorti [cf. H'essed L'Avraham du Rav Avraham Azoulai, grand-père du H'ida, Mayan 3, Nahar 14], de plus nous dit le Rav Moshe Y.Tzouriel [Drishat Tzion, p.28], l'acrostiche du nom d'Itzh'ak constitue tous les noms de la Terre d'Israël :
I
- eretz Israël.
Tz - eretz Tzvi (Terre de Finesse et de Noblesse [=comme la gazelle]).
H' - eretz H'emda (Terre Désirée).
aK - eretz haKodesh (Terre Sainte).


Puissions-nous mériter de tous ces degrés et des bénédictions données à notre Ancêtre, tant celle de la Terre que celle de la descendance.

Aucun commentaire: