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06/09/2009

Un peu de Sionisme religieux…

LEGITIMITE D’ISRAEL
par Elyakim P. SIMSOVIC

« Qu’est-ce que l’Europe ? C’est la Bible et les Grecs. »* Pour nous, aujourd’hui, être européen signifie participer d’une identité d’hommes que les faillites de leurs pères n’ont pas conduit à renoncer à la succession mais au contraire à en assumer la responsabilité pour le remboursement de la dette. Si pour la Bible l’homme est le vivant-qui-parle, c’est la rationalité grecque qui inaugure la possibilité de la communication par le langage avec l’autre homme.

Or, il semble que dans l’Europe d’aujourd’hui aient été répudiés à la fois l’un et l’autre message. L’idéologie un instant contenue par l’horreur d’Auschwitz et du Goulag envahit de toutes parts la pensée politique – ou la pensée tout court – sous les espèces de ce qu’il est convenu d’appeler le politiquement correct. Il est significatif de constater que c’est surtout en relation avec le fait israélien que cette tendance s’est déchaînée pour aboutir à un renversement systématique de toutes les valeurs par lesquelles s’était précisément constituée l’exception européenne dont la France a été pendant longtemps à la fois l’un des artisans les mieux doués et l’un des champions les plus dévoués. Et c’est en invoquant ces valeurs mêmes, pour mieux tromper l’auditeur ou le lecteur crédule, qu’on s’acharne à les vider de tout contenu.


LA BIBLE, ISRAËL ET LES JUIFS
Pourquoi une telle préface à ce qui se doit d’être le rappel de quelques vérités premières concernant l’histoire d’Israël et la nature de la relation qui lie ce peuple à cette terre ? Parce qu’il est vital, pour des Français, de comprendre l’enjeu véritable du conflit qui, ayant Israël pour foyer, concerne en fait, et pour cette raison même, leur propre avenir. Je veux dire par là qu’il n’est pas demandé à l’honnête homme de défendre Israël et de renoncer à sa paix et à son confort pour mener un combat qui n’est pas le sien. En luttant pour la défense de la vérité, c’est d’abord à lui-même et aux siens que l’honnête homme doit penser. C’est pour eux qu’il se bat. Israël ne joue ici qu’un rôle de révélateur. Ce qui est d’ailleurs, le sens ultime, l’alpha et l’oméga de la Révélation biblique. Parce que depuis qu’il est apparu sur la scène de l’histoire, c’est-à-dire dans la conscience culturelle et spirituelle de l’Europe depuis toujours, Israël est, dans son existence quotidienne, qu’elle soit laïque ou religieuse, ce en quoi l’Occident croit. C’est en ce sens qu’à Frédéric le Grand qui lui demandait une preuve de l’existence de Dieu, son médecin a pu répondre : « Sire, les Juifs… »


VUES ARABES ET CHRETIENNES DU CONFLIT ISRAELO-ARABE
Depuis toujours… C’est qu’on oublie trop facilement et trop vite que notre présent se conquiert à chaque instant. La victoire sur le mal n’est jamais définitivement acquise, du moins tant que dure le temps du monde. La foi dans cette victoire finale est le contenu même de l’idée messianique ; mais elle signifie qu’il faut se rappeler tout au long de l’histoire pour quoi on se bat et contre quoi. J’ai dit plus d’une fois que si Israël avait si facilement accepté l’idée de paix que proposaient les accords d’Oslo, c’est qu’en réalité Israël n’a jamais fait la guerre aux Arabes mais avait dû faire face aux agressions sans cesse renouvelées des Arabes contre lui. « Je suis paix, a déjà dit le roi David il y a fort longtemps (1), mais lorsque je parle, eux sont pour la guerre. » C’est ainsi par exemple qu’aux avances d’Israël après la guerre des Six-Jours, la Ligue arabe a répondu le 1er septembre 1967 par les « trois non de Khartoum » : « Non à la paix avec Israël, non à la reconnaissance d’Israël, non à toute négociation avec Israël. » Ce sont encore aujourd’hui les termes de la Charte palestinienne, jamais abrogée, quoi qu’on en dise et ceux de la charte du Hamas. En bref, au-delà des démarches tactiques qui font miroiter le mirage de la paix, le but stratégique reste encore et toujours le refus d’Israël et sa destruction à terme. Ce qu’on désigne habituellement sous le nom de « problème palestinien » n’est pas la cause du conflit israélo-arabe mais son paravent et son instrument.

Il ne faut pas se méprendre. L’erreur serait de croire qu’on serait en présence d’un conflit de type Est-Ouest ou Nord-Sud, c’est-à-dire d’un clivage mettant aux prises l’Occident « judéo-chrétien » avec l’Islam. Le problème est hélas bien plus complexe. En effet, si l’existence d’Israël en tant qu’enclave de souveraineté non musulmane sur une terre conquise par l’islam constitue un défi inacceptable pour ce dernier, un empiètement insupportable sur le dâr-as-sâlam rendu soudain au dâr-el-harb, elle pose aussi un problème non négligeable à la conscience chrétienne par la remise en question de l’image du Juif errant, portant témoignage de sa propre déchéance pour avoir refusé le message évangélique. La connivence entre ces deux « scandales » fait le fond de la facilité avec laquelle la propagande arabe pénètre la société occidentale. Celle-ci, profondément déshabituée à penser les conflits en termes spirituels, considérant comme « d’un autre âge » les guerres de religion et ne voyant dans tout désaccord qu’oppositions d’intérêts, ne comprend pas bien pourquoi les Juifs devraient s’installer sur des terres arabes alors qu’ils sont manifestement si bien partout ailleurs et s’imaginent qu’un partage territorial résoudrait le problème. Même des intellectuels juifs bien intentionnés s’y laissent prendre. Inutile de dire que pour tous ceux-là je suis forcément un extrémiste puisque je revendique le droit d’aimer et d’habiter mon pays et que je n’envisage pas de gaîté de cœur la perspective de devoir y renoncer (pas plus d’ailleurs que les Français n’ont accepté de renoncer à l’Alsace et à la Lorraine et qu’ils ne manifestent pas une sympathie exagérée pour les mouvements séparatistes bretons, corses ou basques.)


VUE JUIVE DU CONFLIT
C’est ignorer superbement, c’est-à-dire avec superbe, la conscience qu’Israël a de sa propre histoire et la signification de son Retour.
Lorsque, dans la situation d’urgence créée en 1903 par les pogroms de Kichinev, en Russie, le Congrès sioniste a été saisi d’une proposition d’installer le Foyer National Juif ailleurs qu’en « TERRE SAINTE » (c’est-à-dire en Ouganda, « offert » par la Grande-Bretagne), la réponse a été claire et elle a été négative : les Juifs n’ont qu’une seule la terre : la terre d’Israël.Il faut le dire aussi : le mensonge est toujours simple et la vérité toujours complexe. S’ajoute à cela que notre culture européenne a acquis de haute lutte – et la langue française peut-être plus qu’aucune autre – l’attachement à la nuance. Or, l’idéologie a la nuance en horreur. Elle fonctionne à coups de hache et nous voudrions, par souci d’honnêteté intellectuelle et morale, lui opposer le scalpel. Un exemple : on nous rabâche à toute occasion, et récemment encore, que la mosquée d’Al Aqsa est le troisième lieu saint de l’islam. Que ce lieu saint ait été construit sur un terrain où s’élevait jadis le Temple de Jérusalem, que les Juifs n’aient jamais cessé de prier pour sa reconstruction sont faits négligeables. Le fait accompli est si ancien qu’on oublie qu’il résulte d’une conquête, d’autant plus que cette conquête fut réalisée alors que les Juifs étaient depuis des siècles privés de leur souveraineté sur cette terre. Or, n’importe quelle civilisation chrétienne ou musulmane qui aurait reconquis le domaine de son lieu saint le plus cher n’aurait eu rien de plus pressé que de raser la construction parasite qui l’encombrerait pour y poser les fondations de son propre sanctuaire. Et le monde entier aurait compris, car quoi de plus normal et de plus naturel. Mais Israël, au lendemain de la guerre des Six-Jours, soucieux de montrer son esprit de conciliation, rend au Waqf les clés que celui-ci avait remises au vainqueur. Certes, la mentalité laïque y était aussi pour quelque chose. Elle démontrait, si besoin en était, l’incompréhension profonde de la nature du conflit et que l’espoir d’une solution passait précisément par l’assomption de la valeur spirituelle de la reprise de Jérusalem. Rendre les clés au Waqf(2) par souci de signification humaniste qu’un tel acte suppose est une nuance incompréhensible pour l’islam. Elle ne peut signifier que la reconnaissance de la légitimité de sa propre présence en ce lieu et donc la reconnaissance explicite par Israël de sa propre illégitimité ou du moins le renoncement à cette légitimité. Trente ans plus tard, l’Autorité palestinienne instaurée par les accords d’Oslo entreprend une campagne visant à nier qu’Israël ait jamais possédé un lieu saint en cet endroit. Et le plus extraordinaire est que cette campagne d’une invraisemblable grossièreté intellectuelle rencontrant aussi une mentalité laïcisée en Europe ne soulève même pas un tollé de la part des chrétiens qui auraient pourtant dû se souvenir que cette négation constituait aussi une insulte aux Évangiles et à leur propre foi.


LES RACINES BIBLIQUES DE LA MEMOIRE JUIVE
Ces chrétiens auraient dû se souvenir que la Bible nous parle déjà dans la Genèse (14:18) de Melchitsédek (3) prêtre du Dieu suprême accueillant Abraham à Salem après l’expédition pour la libération de Loth et recevant de lui la dîme. Les commentateurs juifs traditionnels depuis le Talmud (2ème au 5ème siècle) et le Midrach (4) (herméneutique biblique des rabbins du 1er au 6ème siècle), en passant par Abraham Ibn Ezra (1089-1164) et Nahmanide (1194-1270) en Espagne, David Kimhi (v. 1160-1235) en Provence, disent tous : il s’agit de Jérusalem. Nous sommes entre huit et dix-huit siècles avant qu’un quelconque propagandiste arabe ait rêvé de l’existence d’un soi-disant peuple palestinien.

Rashi de Troyes (1040-1105) commentateur français de la Bible et du Talmud, LE commentateur par excellence, raccroche à cet épisode son commentaire sur le verset 6 du chapitre 12 de la Genèse, commentaire d’une portée capitale ; pour le comprendre, il faut d’abord relire le verset lui-même et en comprendre le contexte.
Mais une remarque à la fois de fond et de méthode s’impose auparavant :
Il faut avoir présent à la mémoire que jamais les Juifs n’ont entretenu avec la Bible le type de relation que les Romains ou les Grecs ont pu entretenir avec leurs mythes. La guerre sans merci menée par les Hébreux contre le paganisme polythéiste et contre l’idolâtrie, à l’intérieur comme à l’extérieur, a été aussi une guerre contre la mythologisation de l’histoire. C’est ainsi, par exemple, que la notion d’ « histoire sainte » n’est pas d’abord d’origine juive, bien qu’elle ait été adoptée sous l’influence notamment des courants rationalistes du 19ème siècle. En effet, cette expression limite en quelques sortes la sainteté de l’histoire à l’époque biblique alors que pour la conscience hébraïque et juive, c’est l’histoire humaine tout entière qui est un gigantesque effort pour parvenir à la sainteté qui n’est autre que la perfection morale d’une identité humaine unifiée devant le Dieu Un. La Bible qui est, pour reprendre l’expression si lourde de sens de notre maître, rav Léon Askénazi (Manitou), à la fois notre charte et notre carte d’identité, n’est pas en ce sens un livre d’histoire. Du moins n’est-ce pas l’aspect événementiel de l’histoire qui l’intéresse, mais la signification de l’événement, son poids spécifique dans la manière dont l’homme prend conscience de son humanité et des devoirs auxquels cette humanité l’invite et des réponses données par l’homme aux sollicitations de l’histoire, réponses par lesquelles il s’engendre à l’avenir ou au contraire se condamne à la préhistoire.


TEXTE, PRE-TEXTE ET CONTEXTE
Le contemporain des événements dont la Bible parle en connaît le contexte comme nous connaissons – ou sommes supposés connaître – notre propre histoire. De même qu’à l’honnête homme et à l’honnête femme de notre temps il suffit – ou devrait suffire – de dire Orléans, Beaugency, Vendôme (texte), pour qu’aussitôt se trouvent évoquées la figure et l’épopée de Jeanne d’Arc, depuis les voix jusqu’au bûcher (pré-texte), et avec elles ce que devint dès lors l’histoire de France (contexte), de même la Bible s’exprime si j’ose dire de manière indicielle. En ce sens, l’essentiel est à la fois dans le détail et dans le non-dit. L’exégèse biblique juive n’est pas d’abord dans l’interprétation des textes mais dans la restitution de l’épaisseur factuelle, vivante, de la réalité dans laquelle s’insère le récit, à l’intention du lecteur qui ne dispose plus des données de la révélation prophétique pour en comprendre, comme intuitivement, le sens et la portée. Orléans, Beaugency, Vendôme peuvent bien être des indices identitaires de premier plan pour la culture française, ce ne sont que des noms de lieux ou encore des sons inarticulés à mesure qu’on s’éloigne, spirituellement et intellectuellement plus que géographiquement, de la vallée de la Loire.


LE RECIT BIBLIQUE
Venons en donc au verset de la Genèse évoqué ci-dessus. L’épisode est connu. Il fait partie en quelques sortes du patrimoine culturel de l’humanité. Rappelons quand même le contexte : Abraham et sa famille ont quitté Ur en Chaldée pour se rendre au pays de Canaan (5) . Ils s’arrêtent en cours de route à Haran, quelque part en Syrie ou au Liban, au nord d’Alep, aux confins du pays des Hittites. Étrange itinéraire qui mène du sud-est au nord-nord-est du lieu de destination, comme s’il fallait le contourner pour y arriver. Vers la fin des années 40 ne fallait-il pas passer par la France pour se rendre en Palestine, venant des pays d’Europe de l’Est ? Et durant ces années-là, ne fallait-il pas déjouer des surveillances et tromper des vigilances par des chemins détournés ? Certaines contraintes sont révélatrices de pesanteurs plus politiques que géographiques. Le père d’Abraham mourra à Haran et sa famille y restera. Mais à l’appel de Dieu, Abraham poursuit la marche entreprise et la mène à bien. Il arrive au pays de Canaan et [c’est ici que se place le verset 12 :6] « traverse le pays jusqu’à l’emplacement de Sichem et de Elon Moré alors que les Cananéens occupaient le pays. » (6)

C’est ici, entre autres, que Rachi intervient : que signifie cette remarque biblique « le Cananéen alors était dans le pays » ? Le Cananéen, comme on dirait le Teuton ou l’Anglais. Rachi nous le rappelle, plus qu’il ne nous le révèle : « il (le Cananéen) était en train de conquérir le pays des descendants de Sem, car c’est à Sem que le pays avait été donné en partage lorsque Noé avait partagé la terre entre ses fils, comme il est dit : et Melchitsédek roi de Salem… C’est pourquoi “Il dit à Abraham : à ta postérité je donnerai cette terre”, c’est-à-dire, à l’avenir Je la rendrai à tes fils qui sont les descendants de Sem. »

Il faut rappeler, pour que ce texte prenne l’ampleur de signification qui lui convient, que Ur en Chaldée qui, pour l’honnête homme et l’honnête femme de notre temps n’a d’autre titre de noblesse que d’être considéré comme le berceau de la civilisation (7), a pour les Juifs une sinistre résonance. Il se trouve que le mot signifie en araméen « la fournaise ardente ». Selon le Midrach, Abraham y fut jeté et en sortit indemne par miracle. Son frère, père de Loth y périt. La famille rescapée des fours crématoires de ce berceau de civilisation – étranges correspondances qui défient le temps – cherche à retourner au pays des ancêtres. Mais les routes sont surveillées et tandis que les Hébreux vont de détour en détour, le Cananéen en profite pour les déposséder, avec la nécessaire complicité des puissances politiques de l’époque. Lorsque enfin les rescapés des rescapés y arriveront, ils trouveront le pays occupé et il leur faudra le reconquérir sur les conquérants.


LEGITIMITE DE L’ISRAËL D’AUJOURD’HUI
Cette histoire nous a été racontée par la Bible et le Midrach plusieurs millénaires avant que l’épopée du sionisme et l’histoire contemporaine ne les rendent d’une actualité qu’on n’ose pas dire brûlante – Israël vient de commémorer il y a quelques jours à peine le souvenir de la Choa.

Le lien qui unit Israël a sa terre n’a besoin d’aucune Société des Nations et d’aucune résolution de l’Onu pour asseoir sa légitimité. Et pourtant Israël a sagement attendu l’une et l’autre ; comme pour dire que dans ce monde sauvage où les États ne savent recourir qu’à la force pour exercer leur domination, il en est un, à la fois très jeune et très ancien qui souhaite voir entériner par le concert des Nations sont retour sur la scène de l’histoire afin que lui soit rendu ce qui est à lui.

Or, il s’agit d’un acte tellement unique dans les annales que par deux fois, après chacune des deux guerres mondiales, le concert des nations s’est dédit et repris aussitôt après avoir octroyé ou concédé sa terre au seul peuple qui puisse prétendre la posséder de droit divin. Droit divin entériné par plus de trois mille cinq cents ans d’histoire et plus de deux mille ans de culture gréco-romaine. Droit divin devenu fait historique et culturel que personne n’aurait eu l’incongruité de contester jusqu’au milieu du siècle dernier (le 20ème siècle).


LES BASES DE LA CONTESTATION
Pourquoi est-ce si gênant ? Pourquoi est-ce à tel point dangereux que ceux qui avaient le plus à y perdre se sont finalement prêtés contre leurs propres intérêts au détournement de la conférence de Durban sur le racisme en une (ker)messe-noire anti-israélienne ?
Parce que le retour d’Israël sur sa terre, sa renaissance nationale invraisemblable et sa reconquête de Jérusalem mille neuf cents ans après sa destruction par les Romains signifie que le diktat des puissants contre les faibles, contrairement aux dons de Dieu, n’est pas sans repentance. Que l’obstination d’un peuple sûr de son histoire lui permet d’en traverser les vicissitudes et de remettre en question, du jour au lendemain, ce que tous tenaient pour acquis. L’histoire d’Israël contemporain est à la charnière de deux mouvements politiques à la fois concomitants et contradictoires :

  • la montée des nationalismes au 19ème siècle qui a favorisé la reprise de conscience nationale du peuple juif que la révolution française et l’Empire avaient cherché à estomper et
  • la décolonisation consécutive à la fin des grands empires européens et aux mouvements d’autodétermination.

Dans un tel contexte, Israël aurait pu devenir à la fois le modèle et le moteur d’un mouvement où précisément les deux grands ensembles issus de lui auraient retrouvé leur inspiration originelle. À l’aube du 21ème siècle, le monde pouvait se trouver transfiguré. Au Pharaon de cette Égypte concentrationnaire qui ne connaissait plus Joseph auraient répondu les voix de ceux qui – comme Cyrus le Grand il y a deux mille cinq cents ans – auraient appelé à la reconstruction de la Troisième Maison d’Israël.


UN TEMPS POUR AGIR…
« Un temps pour chaque chose », a dit l’Ecclésiaste (8) , « un temps pour aimer et un temps pour haïr, un temps pour la guerre et un temps pour la paix. »Peut-être est-il déjà trop tard ? Peut-être est-il encore temps ? C’est en tout cas autour d’Israël que se joue le choix que l’Europe fera de sa propre destinée. Le mot de Churchill doit rester présent à nos oreilles : « vous aviez le choix entre la guerre et le déshonneur ; vous avez choisi le déshonneur, et vous aurez la guerre. » Choisir la guerre est aujourd’hui peut-être le seul véritable moyen de l’éviter, du moins d’éviter qu’elle ne prenne une ampleur de catastrophe universelle. Accepter le mensonge, la veulerie – c’est-à-dire aujourd’hui abandonner Israël – c’est se condamner à se réveiller au matin pour découvrir qu’en se réfugiant dans le rêve on a fait du cauchemar une réalité.

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*Emmanuel Lévinas, Cosmopolitiques, n°4, février 1986, repris dans «À l’heure des Nations», éd. de Minuit, 1988, pp. 155-157.

1) Psaume 120, verset 7.

2) Administration musulmane des Lieux saints musulmans.

3) Voir aussi : Paul, épître aux Hébreux. (On voudra bien me pardonner, mais si je sais citer les Évangiles, je ne puis leur accorder ce que je comprends bien que les chrétiens y voient, ni donner le titre de « saint » à leurs auteurs ou acteurs. D’autant plus que cela est contraire à la mentalité biblique et hébraïque elle-même : chez les Juifs, on ne canonise pas. Nous faisons confiance à Dieu pour décider qui des Juifs et des Gentils siègera au Paradis. J’ai bien dit : « et des Gentils », pas « ou des Gentils ».)

4) Genèse Rabba 43, 56 et alia ; Midrash Téhilim, 76 ; Midrash Agadat Beréshit, 9, 12, 14… Petite statistique hyérosolomitaine : sous la forme défective Yéroushalem, Jérusalem est mentionnée 660 fois dans la Bible, 1057 fois chez les commentateurs médiévaux, 66 fois dans la Michna, 143 fois dans la Tossefta, 28 fois dans les courts-traités talmudiques, 29 fois dans le Talmud de Babylone, 321 fois dans le Talmud de Jérusalem, 1174 fois dans le Midrash, 290 fois dans le Zohar ; sous la forme plénière Yérouchalayim, 4 fois dans la Bible, 1304 fois chez les commentateurs médiévaux, 53 fois dans la Michna, 3 fois dans la Tossefta, 120 fois dans les courts-traités, 612 fois dans le Talmud de Babylone, 6 fois dans le Talmud de Jérusalem, 2127 fois dans le Midrash, 85 fois dans le Zohar.

5) Il serait fastidieux de préciser à chaque fois les références des versets cités et notre propos n’est de toutes façons pas d’érudition. Le lecteur soucieux des sources pourra relire les chapitres 11, 12 et 13 de la Genèse.

6) C’est à Sichem que la populace palestinienne a vandalisé le tombeau de Joseph et assassiné un rabbin qui tentait de sauver quelques vestiges de livres saints. Elon Moré, le Chêne de Moré, a aujourd’hui un statut d’« implantation ». Un verset biblique, ne serait-ce que par la résonance qu’il peut avoir pour qui marcher sur les traces d’Abraham n’est pas une façon de parler allégorique, suffit à démontrer le non-sens de ces catégorisations politiciennes.

7) Qui ne se souvient de la formule célèbre « L'Histoire commence à Sumer » de l'historien américain Samuel Noah Kramer ?

8) Chapitre 3, versets 1 et 8.

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